Les bons côtés de la pandémie de COVID-
19 sont rares, mais l’un d’entre eux est
certainement le fait que les Canadiens ont
renoué avec le plein air et la nature. Nous
avons fait du vélo ou du jogging quand les
gymnases étaient fermés. Au sortir de
réunions Zoom, nous avons marché, contacté
des amis et compté nos pas avec la famille. Et
beaucoup d’entre nous ont découvert pour la
première fois les oiseaux dans nos cours et
depuis nos balcons. Or, la plupart des
Canadiens seraient surpris d’apprendre que le
gouvernement fédéral n’a pas encore adopté le
règlement proposé pour mieux protéger les
oiseaux migrateurs.
Tellement de gens nous ont dit combien de
merles ils avaient vus pendant la pandémie
qu’il semblait y avoir une explosion de la
population. Les ventes de graines pour oiseaux
et de mangeoires ont bondi. Les forums en
ligne et les échanges sur Instagram relatifs à
l’avifaune se sont multipliés. L’isolement et la
distanciation sociale nous ont fait mettre les
pieds dehors et tourner les yeux vers le ciel.
Les oiseaux ont désespérément besoin de ce
regain de popularité en ce moment. En
Amérique du Nord, leur nombre a diminué de
trois milliards depuis 1970. Les oiseaux que
beaucoup d’entre nous tenaient pour acquis —
hirondelles, martinets, alouettes, oiseaux de
rivage — sont beaucoup moins abondants
qu’avant. Les menaces multiples que font
peser les changements climatiques, la perte
d’habitat, la pollution, les chats errants et les
animaux de compagnie non contrôlés, les
vitres des fenêtres et les lignes de transmission
déciment les populations plus rapidement que
celles-ci peuvent se maintenir. Récemment,
des scientifiques ont montré comment le
déclin des populations d’oiseaux et d’autres
espèces sauvages nuit à la dispersion naturelle
des fruits et des graines des plantes, ce qui
compromet la réponse de la nature aux
changements climatiques, car les aires de
répartition potentielles des espèces se
déplacent rapidement.
Il y a plus de cent ans, des dirigeants
visionnaires du Canada et des États-
Unis ont adopté un traité de grande portée
pour protéger les oiseaux migrateurs dont nos
pays partagent les aires. Ce traité, signé
ultérieurement par le Mexique, a permis
d’endiguer la chasse non réglementée
généralisée ; c’est un des accords de
conservation les plus anciens et les plus
efficaces au monde. Jusqu’à ses derniers jours
tumultueux au pouvoir, l’administration
Trump a tenté de vider le traité de sa
substance, mais les changements ont été
annulés l’an dernier par l’administration
Biden. Le gouvernement canadien et la société
civile des deux pays ont fait pression avec
succès pour que les éléments essentiels du
traité soient conservés.
Maintenant, c’est au tour du Canada de
prendre des mesures pour donner plus de
mordant au traité. Le nouveau règlement
fédéral sur les oiseaux migrateurs, proposé en
2019, attend d’être adopté par notre ministre
de l’Environnement et du Changement
climatique, Steven Guilbeault. Plus que la
plupart des citoyens, ce dernier comprendra
comment cette démarche visant à respecter les
engagements mondiaux du Canada en matière
de conservation de la biodiversité servira
également à atténuer les effets des
changements climatiques.
Entre autres avancées pour les oiseaux, le
nouveau règlement, une fois adopté, lèvera
l’ambiguïté actuelle relative au fait qu’il est
interdit de capturer, tuer, blesser ou harceler
les oiseaux migrateurs. Par exemple, il
protégera les nids du magnifique Grand Pic,
une espèce forestière de première importance
[…]. De plus, la nouvelle réglementation
prendra en compte les droits constitutionnels
des peuples autochtones au titre de l’article 35
de la Loi constitutionnelle de 1982, ce qui
constituera une étape importante vers la
réconciliation.
Les nouvelles modifications — attendues
depuis longtemps — qui seront apportées à
l’échelle nationale aux moyens de protection
des oiseaux migrateurs sont judicieuses et
seront efficaces. Ces deux dernières années, la
nature et le plein air nous ont donné un espoir
rassurant et un répit bien nécessaire en ces
temps difficiles. Les oiseaux, en particulier,
nous ont enchantés et ont apporté un
soulagement bienvenu au stress. En effet, ils
ont contribué à nous sauver ; nous leur devon
s de tout mettre en œuvre pour assurer leur
avenir.
* Autres signataires : Jean-Sébastien Guénette,
directeur général, QuébecOiseaux ; Ian
Davidson, directeur régional pour les
Amériques, BirdLife International ; Graham
Saul, directeur général, Nature Canada
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