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jeudi 28 novembre 2024

Le journal LE DEVOIR, par Alexandre Shields

 

https://www.ledevoir.com/societe/environnement/659277/environnement-a-la-rencontre-des-oiseaux-d-hiver

À la rencontre des oiseaux d’hiver

On peut observer plusieurs espèces d’oiseaux de proie à Montréal, comme cet épervier de Cooper, photographié au début du mois de décembre dans l’est de la ville.
Alexandre Shields Le Devoir On peut observer plusieurs espèces d’oiseaux de proie à Montréal, comme cet épervier de Cooper, photographié au début du mois de décembre dans l’est de la ville.

La région de Montréal offre un large éventail de possibilités pour l’observation de la faune, et notamment des oiseaux, y compris en période hivernale. Alors que la pandémie s’étire et pèse de plus en plus sur le moral des citoyens, certains estiment que l’occasion est belle pour prendre le temps de découvrir cette diversité biologique accessible en milieu urbain.

Ornithologue chevronné et bien connu du sud-ouest de Montréal, Jean-Marc Lacoste a publié récemment une vidéo qu’il a filmée à la mi-décembre dans le secteur du parc des Rapides, à Lachine. On peut y voir un couple de pygargues à tête blanche en train de construire un nid, une observation rarissime dans la région pour cette espèce considérée comme « vulnérable » au Québec.

Selon lui, la présence de cet impressionnant oiseau de proie témoigne surtout de l’importante diversité d’espèces qu’il observe tout au long de l’année, y compris en hiver, dans tout ce secteur situé sur le cours du fleuve Saint-Laurent, du parc des Rapides au parc O’Reilly, à Verdun.

Photo: Alexandre Shields Le DevoirLe cardinal rouge (ici une femelle) est très présent en milieu urbain

« Les gens sont surpris d’apprendre qu’il y a des aigles. On peut même les voir chasser. Mais il y a aussi plusieurs autres espèces. Il y a beaucoup de canards, notamment dans le secteur des rapides de Lachine. Un ornithologue me disait souvent qu’on voit plus de canards l’hiver que l’été. Hier, j’ai vu plus d’une soixantaine de garrots à œil d’or en vol. Il y avait aussi des fuligules, des grands harles et des harles couronnés », explique M. Lacoste.

Uniquement depuis le début du mois de janvier 2022, le décompte des observateurs de la faune aviaire fait état d’au moins 26 espèces d’oiseaux identifiées dans le parc des Rapides et de 29 espèces au parc O’Reilly. Et encore, ces identifications ne couvrent qu’une très petite partie du spectre des espèces qu’on peut observer tout au long de l’année. Pour le seul parc des Rapides, M. Lacoste évalue qu’on peut y voir, sur l’ensemble de l’année, entre 120 et 140 espèces d’oiseaux.

 
Photo: Alexandre Shields Le DevoirLe mâle cardinal rouge est facilement reconnaissable à son plumage rouge vif.

« La quantité d’oiseaux est incroyable si on prend le temps de regarder, souligne Jean-Marc Lacoste. Il y a moins d’espèces l’hiver, mais on peut toujours en observer plusieurs. Et dans certains cas, comme pour les rapaces, il est souvent plus facile de les observer en hiver, puisqu’ils sont toujours très actifs. » C’est le cas du faucon pèlerin, une espèce qui a bien failli disparaître, principalement en raison de l’utilisation des pesticides.

Des rapaces en ville

Directeur général de l’organisme Québec oiseaux, Jean-Sébastien Guénette estime lui aussi que la période hivernale est propice à l’observation des oiseaux de proie en milieu urbain ou à proximité des villes. Il cite en exemple la buse à queue rousse, dont on peut voir des individus posés sur des fils ou des arbres, notamment le long de l’autoroute 10, ou encore le harfang des neiges, emblème aviaire du Québec depuis plus de 30 ans. Depuis quelques jours, on rapporte aussi des observations de la chouette lapone, le plus grand hibou d’Amérique du Nord.

Photo: Alexandre Shields Le DevoirLe geai bleu est souvent aperçu en milieu urbain dans le sud du Québec.

M. Guénette ajoute que la région de Montréal compte de nombreux secteurs propices à l’observation d’une grande diversité d’espèces aviaires durant les mois les plus froids de l’année. « Au parc Jean-Drapeau, ce matin, j’ai vu une vingtaine d’espèces. Mais c’est un très bon site pour toutes les saisons. » Même constat pour le Jardin botanique de Montréal, pour le Technoparc Montréal, pour le parc Angrignon, pour plusieurs autres parcs de l’île et le parc national des Îles-de-Boucherville.

Il y a moins d’espèces l’hiver, mais on peut toujours en observer plusieurs. Et dans certains cas, comme pour les rapaces, il est souvent plus facile de les observer en hiver, puisqu’ils sont toujours très actifs. 

« Tous ces sites ont la particularité d’être facilement accessibles, insiste Jean-Marc Lacoste. Nous sommes à proximité de parcs où on peut observer des oiseaux. Moi, je pars à pied de la maison pour aller les observer. On peut aussi y aller en vélo. »

 
Photo: Alexandre Shields Le DevoirLa mésange à tête noire est une espèce emblématique du Québec, notamment en période hivernale.

Que les oiseaux soient présents ou non, ajoute-t-il, ce genre d’activité s’avère bénéfique, en particulier dans un contexte de pandémie, de confinement et de télétravail. « C’est bon pour notre santé physique d’aller à l’extérieur. Et s’il n’y a pas d’oiseaux, on peut toujours observer des paysages magnifiques. Le fleuve, en hiver, est superbe, avec les glaces, le gel, le dégel, etc. Nous sommes en ville et on se promène dans la nature. Tous les jours, je vois quelque chose d’intéressant. »

Même s’il n’existe pas de données précises à ce sujet, tout indique justement que plusieurs personnes ont découvert l’ornithologie depuis le début de la pandémie, selon Jean-Sébastien Guénette. L’organisme Québec oiseaux avait d’ailleurs lancé, dans les premiers mois de la pandémie, l’activité « Des oiseaux à la maison », afin d’inciter les citoyens à découvrir différentes espèces. Pas moins de 5000 inscriptions ont été comptabilisées.

 
Photo: Alexandre Shields Le DevoirLa sittelle à poitrine blanche est souvent observée dans les arbres, descendant le long du tronc, la tête vers le bas.

M. Guénette souligne justement que l’observation des oiseaux très près de chez soi peut être un bon moyen de « sensibilisation » à la faune, notamment pour les plus jeunes. Pour cela, il existe aussi des outils, comme des applications qui permettent d’identifier plus aisément les espèces. On compte également des clubs d’ornithologie à Montréal. Il peut aussi être utile d’installer des mangeoires en période hivernale, mais à condition de bien les entretenir et les nettoyer pour éviter que celles-ci deviennent des lieux de transmission de maladies.

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C’est le nombre d’espèces d’oiseaux identifiées dans le parc des Rapides depuis le début du mois de janvier 2022, selon le décompte des observateurs de la faune aviaire.

mercredi 27 novembre 2024

6 janvier 2022 - Journal Métro - Un nid de pygargue à tête blanche -

 Lien Journal Métro:

https://journalmetro.com/local/lasalle/2754222/nidification-aigle-a-tete-blanche/

LASALLE

Un nid de pygargues à tête blanche dans le refuge de l’Île-aux-Hérons

pygargue à tête blanche
Un pygargue à tête blanche sur le fleuve Saint-Laurent en 2017Photo: Jean-Marc Lacoste/Gracieuseté

Un couple de pygargues à tête blanche, anciennement appelé «aigle à tête blanche», a récemment été observé en train de construire un nid dans l’archipel de l’Île-aux-Hérons, à LaSalle. Avec les tentatives de nidification qui ont été rapportées dans le secteur ces dernières années, cet événement, qui reste assez rare à Montréal, est un bon signe du rétablissement de cette espèce vulnérable, croit un expert.

«Ce qu’on voit ces jours-ci, c’est un mâle et une femelle faire du transport de branches afin de construire un nid tout neuf, au sommet d’un arbre d’une île de l’archipel», explique Jean-Marc Lacoste, ornithologue amateur d’expérience, qui a rapporté l’événement.

nidification pygargue à tête blanche
Deux pygargues à tête blanche nichant au sommet d’un arbre, dans l’archipel de l’Île-aux-Hérons, à LaSalle, le 31 décembre 2021.

Le 13 décembre dernier, M. Lacoste avait d’abord aperçu un pygargue qui faisait des aller-retour entre les berges du fleuve et un site de nidification potentiel, en transportant des branches. Puis, le 31 décembre, l’ornithologue a observé le couple de rapaces trônant sur un nid construit au sommet d’un arbre sur une île des Sept-Sœurs, dans le refuge d’oiseaux migrateurs de l’Île-aux-Hérons.

Une tentative dans le secteur avait été observée en mars 2010 et avait malheureusement avorté à la suite de la disparition de l’un des deux oiseaux, raconte M. Lacoste. Une autre tentative non concluante aurait eu lieu l’an dernier.

«On va savoir fin-mars ou début-avril [au moment de la pondaison] si cet essai est fructueux, mais c’est sûr que nous allons suivre ça avec intérêt puisque c’est un événement très rare à Montréal», poursuit le membre d’Héritage Laurentien, un organisme qui œuvre dans l’éducation environnementale à LaSalle.

Une nidification hâtive

La ponte d’œufs ne signifiera toutefois pas que le tour est joué, rappelle Guy Fiztgerald, vétérinaire spécialisé en médecine des oiseaux de proie à l’Université de Montréal et membre de l’Équipe de rétablissement des oiseaux de proie du Québec.

«Je trouve ça étonnant que le nid soit construit en ce moment. C’est très tôt. Ça me donne l’impression que de nicher aussi hâtivement pourrait causer de mauvaises surprises aux parents.»

Si les œufs sont pondus prématurément, des facteurs météo comme un refroidissement draconien ou un manque d’accès à la nourriture pour le mâle pourvoyeur pourraient affecter le développement de l’embryon durant la couvaison, explique le spécialiste.

«Par contre, le fait que le nid soit sur une île qui est peu accessible, où les pygargues ont moins de chances de se sentir dérangés, pourrait augmenter les chances de succès. Ces oiseaux-là ont besoin d’une bulle assez grande.»

Un retour en force

L’expert se réjouit aussi que cette observation soit symptomatique d’un retour en force de l’espèce dans la province, après qu’elle a été désignée espèce vulnérable par le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs en 2003.

Entre les années 1930 à 1970, l’oiseau national des États-Unis – l’emblématique Bald Eagle – a subi un déclin important dans l’est du continent américain, notamment à cause des pesticides organochlorés (dont l’infâme DDT) et leurs effets toxicologiques sur la reproduction de l’espèce.

«C’est heureux de voir que la population est en augmentation au Québec, même si on ne sait pas encore à combien d’individus s’élève une population saine», fait observer M. Fitzgerald.

mardi 26 novembre 2024

Reprise - L'amoureux des oiseaux - par Oona Barrett

 


L’amoureux des oiseaux

Entre Verdun et LaSalle, hiver comme été, Jean-Marc Lacoste arpente la nature du quartier à la recherche d’oiseaux. Récemment, il a observé un phénomène rare, la naissance de deux aigles à tête blanche sur l’île aux Hérons.

À l’aide de son appareil Canon, de son télescope et d’un peu de patience, l’amoureux des oiseaux admire des centaines d’espèces, dont de grands hérons, des aigrettes, des carouges et beaucoup d’autres.

Les Montréalais ne s’imaginent pas qu’on a la possibilité d’observer autant d’espèces, mais il suffit de lever la tête. 

Jean-Marc Lacoste

Que ce soit au parc des Rapides, au parc Angrignon, ou le long des berges de Verdun, il est dur de se douter que plus de 200 espèces y trouvent refuge.

Une découverte hors du commun

En décembre dernier, à plus de 600 mètres de la côte, Jean-Marc Lacoste avait observé un couple de pygargues à tête blanche, aussi appelés «aigles à tête blanche» formant un nid sur l’île aux Hérons, à LaSalle.

Un pygargue sur l’île aux Hérons. Photo de Jean Marc Lacoste

Après avoir observé tous les jours les nouveaux arrivants, Jean-Marc Lacoste a le privilège d’assister à l’accouplement. Selon ses calculs, la naissance des oisillons était prévue pour la mi-avril. Ces calculs se sont révélés bons.

Cette naissance est une première à Montréal, en effet, deux autres couples avaient tenté ces dernières années, mais l’opération s’était révélée sans succès.

Il ne reste plus qu’à espérer que les oisillons seront assez forts pour survivre aux premiers mois de leur vie afin d’atteindre leur taille optimale, qui est censée dépasser la taille de l’aigle royal.

Lien vidéo

https://youtu.be/RtTACcsbmw8?si=wIo-ry7rM10A9v9D



Pygargue à tête blanche et deux juvéniles – Jean-Marc Lacoste

De la politique aux oiseaux

Le septuagénaire a un passé politique bien rempli, d’abord député du Parti québécois dans les années 70, il a ensuite été commissaire scolaire et conseiller municipal.

Impliqué depuis plusieurs décennies dans le quartier qui l’a vu naître, le Verdunois ne cesse de rappeler l’importance de protéger le fleuve et ses îles, auxquels il est si attaché. En effet, il explique que beaucoup d’espèces pondent à même le sol. «Lorsque les gens marchent sur l’île, ils détruisent les œufs», ajoute-t-il.

Depuis sa retraite, il est aussi bénévole pour Héritage Laurentien, un organisme qui œuvre dans l’éducation environnementale de LaSalle, ce qui lui a permis d’être encore plus proche de la nature. Aujourd’hui, ce passionné d’oiseaux se fait surtout connaître pour ses vidéos et photos qu’il publie sur son blogue ou sur le site d’Héritage Laurentien.

Jean-Marc Lacoste est bien connu de tous dans le quartier et surtout des enfants. Plusieurs fois par année, il fait des conférences dans les écoles primaires pour transmettre sa passion de la nature aux jeunes enfants en leur distribuant  des photos d’oiseaux plastifiées, qu’ils s’échangent entre eux un peu comme les cartes Pokémon. «Parfois, ils me demandent même des autographes», dit-il. D’ailleurs, il ajoute avoir «été surpris de voir que beaucoup d’enfants connaissent les oiseaux mieux que [lui]!»

L’amoureux des oiseaux espère que cette sensibilisation aidera les générations suivantes à protéger les îles du fleuve et sa diversité d’oiseaux.