dimanche 6 juin 2021

Les effets des pesticides sur les oiseaux sont "largement sous-estimés", affirment des chercheurs de Bourgogne - Journal du Centre -06/06/2021



Les effets négatifs des pesticides « sont largement sous-estimés ». C'est ce qui ressort d'une étude pilotée par un laboratoire de l'université de Bourgogne. Une exposition à des doses faibles peut avoir des effets tout aussi dévastateurs sur la survie et sur la reproduction des oiseaux, affirme l'étude.

Les études scientifiques sont unanimes : les pesticides, ingérés à fortes doses, ont des effets létaux sur les populations d’oiseaux. Mais, pour la première fois, une étude pilotée par le laboratoire biogéosciences de l’université de Bourgogne (avec le centre d’études biologiques de Chizé, université de La Rochelle). montre que les effets négatifs des pesticides « sont largement sous-estimés ». Sur le long terme, une exposition à des doses faibles peut avoir des effets tout aussi dévastateurs sur la survie et sur la reproduction des oiseaux, affirme-t-elle.

Anémie, malnutrition, infection

L’étude, publiée en mars dernier dans Environmental Pollution, s’appuie sur des travaux conduits auprès de deux groupes de perdrix grises, nourries pour les unes à base de céréales issues de l’agriculture biologique, pour les autres à base de céréales conventionnelles (où les résidus de pesticides sont pourtant en doses infinitésimales). « Les résultats montrent qu’en moins de 10 semaines, la santé des individus consommant des aliments issus de l’agriculture conventionnelle se dégrade fortement », explique Jérôme Moreau, chercheur à l’université de Bourgogne.

Si l’état de santé des oiseaux qui ne mangent pas bio se dégrade, quid chez l’humain ?

À la prise de sang, les chercheurs ont constaté « une anémie », des signes de « malnutrition » et « d’infection ». Les mâles développent même, en période de reproduction, une coloration plus terne, qui traduit cet état de santé dégradé.

« Plus surprenant », « nous avons constaté que les femelles nourries avec le grain conventionnel » deviennent plus « corpulentes ». « Les pesticides sont des perturbateurs endocriniens qui, en déréglant le fonctionnement hormonal, agissent sur le stockage des graisses », avance Jérôme Moreau.

Les chercheurs poursuivent leurs travaux d’observation, notamment sur les passereaux, dont les effectifs dans les plaines agricoles ont chuté un peu moins fortement (- 30 % ces dix dernières années contre - 90 % chez les perdrix). Et, en attendant, ils s’interrogent. « Si l’état de santé des oiseaux qui ne mangent pas bio se dégrade, quid chez l’humain ? »Alexandra Caccivio