| Photo: 4 novembre 2025 par Jean-Marc Lacoste |
Extrait
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Depuis 2024, l’organisme Renature Montréal élimine les plantes envahissantes et les remplace par des fleurs sauvages à Verdun. L’initiative citoyenne, qui a débuté derrière les serres municipales, s’est étendue aux berges cet été sur la longueur entre les serres et le terrain de basket-ball.
Le couple de citoyens Oz et Joan Obukoro sont les membres fondateurs de Renature Montréal. D’abord ornithologues, ils ont remarqué que les oiseaux fréquentaient de moins en moins les berges. Intrigués, ils se sont intéressés à l’agriculture et ont découvert que Montréal était devenu un « désert alimentaire » pour ces animaux, comme d’autres villes d’Amérique du Nord.
Ils ont donc décidé de débarrasser les berges de Verdun des plantes envahissantes afin de rétablir l’écosystème, en plantant des fleurs sauvages indigènes qui attirent les insectes, et ce faisant offrent un habitat accueillant et de la nourriture.

Une initiative qui en engendre une autre
En avril 2024, M. et Mme Obukoro ont arraché les mauvaises herbes et semé des graines de fleurs sauvages derrière le Grand potager de Verdun.
Quelques mois plus tard, ils ont ensuite demandé à l’Arrondissement de Verdun l’autorisation d’utiliser cette technique de l’autre côté de la piste cyclable, sur les berges. L’objectif ? Aider la Ville à se débarrasser des plantes envahissantes, dont la renouée du Japon et le phragmite, ce dernier étant particulièrement invasif sur les berges du Saint-Laurent.
L’Arrondissement leur a offert 500$ pour mener à bien leur projet. À ce jour, Renature Montréal a dépensé 400$ en matériel incluant la terre noire et des outils, plus 100$ pour acheter un coupe gazon. Les graines sont gratuites.
M. et Mme Obukoro travaillent tous les jours sur les berges, parfois accompagnés d’autres bénévoles.
Le gazon fétuque comme alternative aux rouleaux de gazon
Renature croit que l’avenir de verdissement des villes passe par le gazon fétuque. Ce type de gazon est semé et engendre des racines de trois à quatre pieds de profondeur, selon M. Obukoro. À maturité, ce gazon ne nécessite pas d’arrosage, car il s’irrigue à même le sol.
Le citoyen croit que les villes nord-américaines devraient remplacer leur usage des tapis de gazon par le gazon fétuque, car il moins dispendieux et plus écologique.
Renature a choisi de réserver une section des berges de Verdun au gazon fétuque pour faire connaître cette alternative écologique à la population. « C’est pour montrer aux gens à quoi ça ressemble, leur montrer ce qui est possible », soutient-il.

« Tellement simple, facile et rapide »
En août 2024, une fois le permis de la Ville obtenu, Renature a commencé à arracher le phragmite et à mettre de la terre noire, avant de semer des graines de fleurs sauvages indigènes.
Après un premier essai où une quinzaine d’espèces ont survécu, il a fallu tout arraché, car trop de graines d’onagre avaient été plantées, cette dernière empêchant la diversité de l’écosystème à rétablir, selon leurs observations.
« L’onagre crée une ombre, car elle est haute et ses feuilles sont larges, explique M. Obukoro. Les autres variétés ne pouvaient plus pousser au ras du sol. »
La majorité des fleurs que l’on voit cet été sur leur lopin de terre est la rudbeckie hérissée, une fleur jaune au centre noire qui ressemble à une marguerite.
Renature Montréal soutient que sa technique est « simple, facile et rapide », et croit qu’elle pourrait être adoptée à grande échelle.
Une initiative citoyenne peu contrôlée
Virginie Michaud est biologiste à Héritage Laurentien, un organisme laSallois qui promeut la protection de la biodiversité dans le sud-ouest de Montréal.
Elle explique à Nouvelles d’Ici que les initiatives citoyennes de ce type gagnent en popularité et qu’il est important de s’assurer que les actions posées, même si bien intentionnées, ne nuisent pas au contraire à l’écosystème.
Elle déplore que l’expertise des biologistes ne soit « pas valorisée », au profit de celle de citoyens et citoyennes qui s’informent mais ne sont pas forcément formés et peuvent, dans certains cas, animer des conférences citoyennes contenant parfois de l’information erronée.
Mme Michaud explique qu’il existe « plein de spécificités » à respecter pour rétablir l’écosystème d’ici, notamment l’importance de semer des graines indigènes à la vallée du Saint-Laurent et non au Canada en général.
Selon la compréhension de Nouvelles d’Ici, la technique de restauration des berges utilisée par Renature Montréal n’a pas été validée ou invalidée par l’Arrondissement de Verdun.
Un possible risque d’érosion ?
L’agente de développement en transition socio-écologique à l’arrondissement de Verdun, Vicky Saint-Pierre, est la personne responsable de cette initiative citoyenne et assure un suivi avec M. et Mme Obukoro.
Elle indique que le projet n’est pas considéré comme un projet pilote. « Je ne peux pas vous dire si on irait de l’avant avec quelque chose de plus large, a-t-elle affirmé à Nouvelles d’Ici. Pour l’instant, on suit le projet. »
Mme Saint-Pierre soutient que l’enjeu du phragmite est « très important » pour Verdun, mais que le projet suscite une inquiétude face à une possible érosion des berges. « En enlevant le phragmite, ça vient fragiliser le sol, croit Mme Saint-Pierre. Pour l’instant, ça ne semble pas être une problématique. »
Mme Michaud indique qu’une bonne pratique serait de planter un mélange d’arbustes, de semis et de graines pour prévenir l’érosion, les arbustes ayant des racines qui peuvent stabiliser le sol après avoir arraché le phragmite.
M. Obukoro a affirmé à Nouvelles d’Ici ne pas avoir observé d’érosion sur le site.
Un volet éducatif à développer
Renature Montréal souhaite sensibiliser la population aux enjeux de l’écosystème des berges au-delà des brefs échanges avec les curieux et curieuses. M. Obukoro songe notamment à organiser des discussions la fin de semaine et à élaborer un « musée vivant ».
Cet automne, le couple plantera des fleurs sauvages en dessous des arbres, à l’extrémité ouest du lopin de terre.
Les personnes qui désirent en savoir plus sur Renature Montréal peuvent consulter leur site web.
La photo de couverture a été prise par Odile Joron.