mercredi 12 avril 2023

La Mésange à tête noire : 10 grammes d'hyperactivité

 

Mésange à tête noir
Photo: Jean-Marc Lacoste

Extrait: La Presse par Pierre Gingras

La mésange à tête noire est un de nos oiseaux les plus familiers. Elle cohabite avec nous à longueur d’année et fréquente nos mangeoires assidûment.

La mésange à tête noire est une grande hyperactive.

À la mangeoire, son va-et-vient est incessant. En une fraction de seconde, elle cueille une graine pour aller décortiquer son modeste festin jamais bien loin et revenir rapidement, un ballet aérien toujours exécuté en groupe au cours de l’hiver.

Il faut dire qu’à -15 °C ou -20 °C, la petite touffe de plumes d’à peine 10 grammes ne peut guère faire autrement. Elle doit manger du matin au soir, surtout qu’en saison froide, les nuits sont longues.

Elle dort d’ailleurs en solitaire dans l’anfractuosité d’un arbre et, miracle de l’évolution, sa température corporelle peut alors baisser d’une dizaine de degrés, une économie d’énergie qui assure sa survie.

Parlant d’adaptation, les muscles de ses pattes sont particulièrement développés, si bien que c’est la tête en bas qu’elle cueille souvent insectes et graines aux branches. La nourriture étant beaucoup plus rare en hiver, elle dépose aussi des victuailles dans des milliers de caches au cours de l’automne, toujours un seul élément par cachette, trésors qu’elle localise ensuite au moment opportun, évitant même les endroits déjà visités pour économiser une fois de plus son énergie.

UNE POPULATION EN HAUSSE

La mésange à tête noire est une des espèces les plus répandues au Canada et dans le nord des États-Unis, et la plus assidue aux postes d’alimentation. D’ailleurs, si une foule d’oiseaux sont en déclin depuis quelques décennies, comme les hirondelles et même le moineau domestique, sa population a doublé de 1990 à 2014, nous indique le dernier Atlas des oiseaux nicheurs du Québec. La situation serait attribuable en partie au très grand nombre de mangeoires disponibles.

La vie sociale du petit passereau est soumise à une hiérarchie rigide, surtout en hiver quand les oiseaux évoluent en petit groupe. Les mâles dominent les femelles (tous deux sont identiques) et les oiseaux plus âgés, les plus jeunes. Aux mangeoires, les uns laissent toujours la place aux autres. Les couples dominants s’installent normalement sur un territoire plus grand, ont un meilleur accès à la nourriture, produisent davantage de petits dont le taux de survie est plus grand. Ce qui explique peut-être que le taux de divorce est relativement bas… Une quinzaine de cas seulement lors d’une étude menée durant plusieurs années sur 94 couples !

Plus solitaire durant la période de reproduction, la mésange niche dans une cavité souvent creusée dans du bois pourri, produit une nichée par année d’environ quatre à cinq petits, le mâle nourrissant la femelle durant l’incubation d’une douzaine de jours. Le régime alimentaire estival est composé presque exclusivement d’insectes sous une forme ou une autre alors que l’hiver, la moitié de la nourriture est d’origine végétale.

Les petits se reproduisent à 1 an. Là encore, ils ne peuvent guère faire autrement, pour maintenir la population. C’est que les prédateurs sont nombreux, notamment les petits rapaces. Au nid, la progéniture figure souvent au haut du menu des écureuils et ratons laveurs. Mais la petite boule d’énergie a néanmoins une longévité d’un peu plus de 2 ans et un individu a même déjà atteint l’âge phénoménal de 11 ans et 8 mois. Il avait été bagué dans l’État de New York en 2009 et capturé à nouveau puis relâché en 2021.

DES NICHOIRS DOUILLETS

Le vocabulaire musical de la mésange comprend une quinzaine de variantes et sa douce mélodie printanière devrait se faire entendre bientôt. Ses cris d’alarme ont un effet immédiat sur les autres espèces qu’elle côtoie, comme les pics, les sittelles ou les bruants. Peu farouche, elle se laisse approcher facilement lorsqu’elle fréquente une mangeoire. Avec un peu de patience, elle viendra même manger dans votre main le tournesol noir, qu’elle apprécie particulièrement. D’ailleurs, elle s’abreuvera aussi régulièrement au bain d’oiseaux, mais s’attardera rarement pour s’y tremper. La mésange à tête noire ne dédaigne pas non plus de cohabiter avec nous si elle dispose d’un nichoir qu’on aura eu soin de tapisser de fins copeaux de bois ou encore de bran de scie.



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